« Connaitre, ce n’est point démontrer, ni expliquer, c’est accéder à la vision »

Antoine de Saint-Exupéry

mercredi 21 février 2018

DE L’UTILITE DES REGLES DANS L’ENTREPRISE

Depuis les années 60, nous avons, particulièrement en France, un problème avec l’autorité.

La société hédoniste que nous avons construite nous porte à idéaliser une fausse conception de la liberté qui se résumerait à : « je fais ce que je veux, quand je veux. »

Hélas, nous faisons quotidiennement l’expérience, quelque soit notre état de vie, que pour continuer à vivre dans ce monde, il faut se soumettre. Se soumettre aux lois de la nature humaine (si je ne mange pas, si je ne bois pas, je meurs), se soumettre aux lois et aux règles de la vie en société.

Ces lois trouvent leur sens dans la nécessité du respect de soi et de l’autre dans notre intégrité (physique, intellectuelle, émotionnelle et spirituelle).

Sous chaque règle, sous chaque loi il y a une contrainte et une frustration potentielle. Les règles et les lois sont une limite à notre liberté individuelle au service d’une protection personnelle et collective. C’est pourquoi, pour qu’elles soient acceptablent, ils faut qu’elles aient du sens, qu’elles soient expliquées, comprises et acceptées.

Les règles ont deux finalités : la sécurité et l’efficacité ou fluidité.
Pour mieux comprendre, prenons pour exemple le code de la route. Le code de la route n’a de sens et ses règles ne sont acceptables que parce qu’elles permettent d’améliorer la sécurité des usagers et de faciliter la circulation. S’arrêter à un feu rouge est une limite à ma liberté d’aller et venir. Si je suis pressé, cela peut générer une frustration. Mais c’est parce que tous s’arrêtent au rouge et passent au vert que je peux poursuivre ma route sans craindre d’avoir un accident.
Les règles ont aussi pour utilité de favoriser les flux, tous les mouvements qui régissent nos vies au quotidien. S’arrêter au feu rouge est à priori une perte de temps. Mais, si le feu est placé dans un endroit stratégique, il permet d’éviter les embouteillages. Quand le feu passe au vert, la voie est dégagée et finalement, je gagne du temps.

Dans l’entreprise, les règles ont la même utilité. Exiger, par exemple, que tous soient présent en même temps (respect des horaires) n’a pour finalité que l’efficacité du travail.  Cette efficacité est une nécessité objective (impératif de résultat) mais également subjective (être heureux au travail c’est pouvoir admirer l’œuvre accomplie).

Nous constatons depuis les années 70 une inflation inquiétante des règles. Cette inflation a deux conséquences néfastes :

- La multiplication des règles inutiles et inutilement frustrantes ce qui provoque le résultat inverse de ce que l’on pourrait en attendre : une perte de sens et un désengagement généralisé
- Le développement de la défiance qui pousse un nombre de plus en plus important de collaborateurs à transgresser les règles.


Il est donc urgent et nécessaire de revister les règles et de s’interroger sur la nécessité d’en promouvoir de nouvelles. Tout le mouvement de l’entreprise libérée repose sur ce constat.

A bientôt...

vendredi 2 février 2018

Et tout le monde s'en fout #3 - Les émotions -

LA PERSONNE AU TRAVAIL

Pierre Yves Gomez, économiste, Docteur en gestion et professeur à EMLYON Business School, a écrit un très bel ouvrage sur « l’intelligence du travail » dans lequel il remet les choses en perspectives.

Avant d’être un consommateur, l’Homo Economicus est un producteur. La société de consommation nous a fait perdre cette réalité première. Selon lui, ce qui est à l’origine du lien social, ce n’est pas, comme nous le laisse croire la société de consommation, notre capacité à consommer toujours plus, mais notre capacité à produire, à réaliser une œuvre à travers la mise en œuvre d’un travail porteur de sens et socialement reconnu. Et il en veut pour preuve que la perte de toute activité est la première cause de désocialisation.

Le bonheur passe donc par le travail

Voici sa définition du travail : « J’appelle travail l’activité de l’être humain qui, confronté à des contraintes, produit selon un projet déterminé, quelque chose pouvant servir à d’autres ».

Ce qui donne sa valeur au travail selon lui, c’est ce que l’on peut répondre lorsque l’on pose la question suivante : « A quoi cela sert il ? ».

Pour Pierre Yves GOMEZ, cette valorisation n’est donc pas nécessairement financière. Il englobe dans sa réflexion le bénévolat ou toute situation dans laquelle une personne agit pour lever une contrainte.

La mère de famille qui conduit son enfant à son cours de sport réalise, selon lui, un travail. La contrainte dans ce cas est la distance et le temps imparti pour réaliser le trajet. Conduire son enfant en voiture limite le temps nécessaire au déplacement et diminue la contrainte de la distance.

Il va même plus loin en développant l’idée selon laquelle la contrainte financière qui encadre le travail en entreprise lui a fait perdre son sens. Le bénéfice financier en l’emportant sur la nature et la finalité du travail réalisé a créé les conditions d’une aliénation du travailleur à la dimension économique de l’entreprise. Elle en a fait un consommateur en lieu et place d’un producteur

Pour produire un travail humain, il faut donc : des contraintes, un projet déterminé, une action et un résultat valable.

Le travail humain consiste alors à analyser les informations reçues, les mettre en perspective avec le projet, puiser dans ses ressources intellectuelles et en particulier sa mémoire pour imaginer une solution adaptée à la situation, faire appel à ses ressources spirituelles et sa capacité créatrice pour donner de la valeur à son action puis agir pour obtenir un résultat.

Dans le cas de l’enfant qui doit se rendre à son cours de sport, la meilleure solution, celle qui sera peut-être là plus moralement satisfaisante, c’est éventuellement de laisser l’enfant se rendre seul à vélo à son cours de sport pour qu’il développe ainsi son autonomie.