Consultant Formateur et Coach, j'accompagne les acteurs de l'entreprise dans la mise en place ou la restauration de l'esprit de coopération
« Connaitre, ce n’est point démontrer, ni expliquer, c’est accéder à la vision »
Antoine de Saint-Exupéry
jeudi 23 juillet 2015
dimanche 28 juin 2015
jeudi 16 avril 2015
L'illusion du tout économique et du tout rationnel
Dans le milieu des années 70 nous est parvenu depuis
l’archipel Nippon un vent d’espoir de perfection industrielle sous la
forme de la « théorie du zéro défaut ». Et il faut bien reconnaître que ces méthodes de travail Japonaises étaient et restent attractives et ont
permis aux organisations de gagner en qualité et en rentabilité. Cette
nécessité de tendre vers une perfection est un bien qui a bénéficié à
l’ensemble des consommateurs que nous sommes. Mais hélas, ce qui devait être et
rester une philosophie pour tendre vers la perfection est devenu un mythe.
Il est illusoire, en effet, de prétendre qu’une entreprise,
quelques soient les qualités de son organisation, puisse prétendre à une
production sans défaut.
Un surf rapide sur le web permet de prendre conscience du
dérapage idéologique qui s’est emparé de cette philosophie.
La théorie du zéro défaut est un concept d'efficacité des
entreprises qui s'inscrit dans la recherche de la qualité totale. http://fr.wikipedia.org/wiki/Z%C3%A9ro_D%C3%A9faut
Quelle réalité peut-on attacher au concept de « qualité
totale » ?
Voici ce qu’écrivait Bruno Lamotte dans un article « La
dynamique de la qualité. In: Revue d'économie industrielle. Vol. 42. 4e
trimestre 1987. pp. 16-30. »
« L'expression Total Quality
Control est porteuse de malentendus parce que l'idée qu'elle veut exprimer
n'est pas celle de contrôle, mais surtout celle d'amélioration de la gestion
de la qualité. Il s'agit donc bien d'une philosophie toute différente du
contrôle…On dit qu'une entreprise qui a réussi la mise en place et la généralisation
des cercles (de qualité NDA) a fait 20 à 25 % du chemin vers la mise en place
d'un système impliquant toute l'entreprise vers la recherche de la qualité, et
que c'est un premier pas indispensable. La mise en place d'un tel
fonctionnement dans une entreprise peut prendre plus de 4 ans. L'entreprise A (entreprise
étudiée aux fins de l’article NDA) définit ainsi les liens les plus importants
de la maîtrise de la qualité :
In fine, l'amélioration de la qualité
vise à la hausse des profits, tant par la baisse des coûts que par
l'augmentation des parts de marché. Les exigences de qualité et de productivité
ne sont pas contradictoires pour elle. »
L’idée de base apparaît comme porteuse de sens et en lien
direct avec le souci des clients pour une relation de confiance durable :
produire des biens et services de qualité. Hélas, il s’agit aujourd'hui d’un « mode de
gestion » destiné à « augmenter les profits ». Le détournement
de la portée « philosophique » des projets de développement de la
qualité par les théoriciens de l’industrie les ont incités en réalité à une
inflation de règles et d’outils de contrôles.
On trouve ici les fondements
d’une mise sous tension des salariés non plus vers la satisfaction du client
mais vers la chasse aux surcoûts. La satisfaction d’un besoin ou d’un désir n’est
plus alors la finalité réelle de l’entreprise
mais un possible bénéfice secondaire.
On comprend que l’objectif initial est d’amener les
entreprises à tendre vers le zéro défaut. Mais insidieusement, certains se sont
mis à croire que le mythe pouvait devenir réalité ! C’est du moins ce
qu’ils laissent entendre à leurs partenaires quand ils leurs refusent le droit
à l’erreur. C’est le message que les grands donneurs d’ordres se sont plu à
faire entendre à leurs différents partenaires en interne d’ailleurs comme en
dehors de l’entreprise.
S’étant fixé cet objectif irréaliste, ils ont pris conscience
que leurs partenaires, leurs fournisseurs étaient dans l’incapacité d’y
parvenir. Ils ont remis en cause leur
confiance relationnelle traditionnelle en les jugeant incapables de trouver des
solutions par eux même. Pour pallier à ce climat de méfiance, Ils ont mis en
place des outils afin de créer un climat de « confiance
artificielle ». En rationalisant toutes les opérations de fabrication
chez tous les intermédiaires depuis la matière première brut jusqu’au produit
finit, on supprime les aléas et on obtient un produit sans défaut.
Avant de poursuivre ma démonstration, je souhaite m’arrêter
un instant sur la problématique du profit dans les entreprises. Pratiquement
tous les dirigeants s’accordent aujourd’hui pour affirmer que la finalité de
leur entreprise c’est de faire du profit. A la suite de Milton Friedman,
économiste et grand théoricien de l’économie libérale, ils s’accordent à penser
que c’est difficile voire impossible de concilier responsabilité social et
sociétale et performance économique. Les grands élans écologistes que nous
vivons actuellement poussent certains à communiquer sur le « développement
durable » dans lequel ils tentent d’inscrire leur entreprise mais en
réalité, quand on gratte le vernis, on découvre qu’il s’agit généralement d’opérations
de communications.
Il me semble personnellement que les maux que subissent les
systèmes économiques en ce début de 21ème siècle viennent de la
« confusion de finalité ». Faire du profit n’est pas et ne pourra jamais
être une finalité. C’est un moyen. Et comme vous pouvez le constater dans le
schéma ci-dessous, les moyens sont très bas dans la dynamique de motivation
d’un collaborateur voir d’un usager ou utilisateur.
Voici la définition de la finalité dans Encyclopaedia
universalis. Accrochez-vous !
« La finalité d'une action en
est le « pourquoi », le sens, par opposition à son « comment », aux mécanismes
ou fonctionnements qu'elle met en jeu. Le mot « finalité » et l'expression «
cause finale » sont démodés ; on les emploie souvent entre guillemets, comme
antiscientifiques. »
« La finalité est éprouvée comme
une évidence lorsque l'on entreprend de faire quelque chose, d'obtenir un
résultat. Cette évidence conduit à interpréter comme « finalisée » l'action
observée d'un autre : Que veut-il faire ? Quel est le sens de son acte ? On
pense observer de la finalité, non seulement dans l'action d'un homme, mais
dans le comportement ou la structure d'un organisme, même supposé
inconscient, si l'on y voit une certaine adaptation de moyens à une fin, si
ses actes ou ses organes semblent appropriés à sa survie. On en trouve de même
dans tout système constitué, vivant ou non, lorsque ses parties paraissent
agencées relativement à une fonction de l'ensemble. Un appareil qui résulte
de notre « faire » nous savons qu'il est finalisé – par nous. Un équipement
industriel sert aux usagers, son fonctionnement a une fin. Par analogie, les
systèmes naturels donnent l'impression d'avoir une fonction bénéfique ou
maléfique. »
La finalité d’un autocar, c’est de transporter des usagés. Ce
n’est pas de rouler économiquement. Tant mieux si les deux sont conciliables.
Si l’entreprise de transport met comme finalité l’économie, il faut qu’elle
cesse de faire rouler ses autocars ! Nous pouvons comprendre que les
messages de maîtrise des coûts répétés à l’envie aux salariés de certaines
entreprises finissent par brouiller le sens de leur engagement et la compréhension de l'utilité de
leur entreprise.
Dans l’industrie, on observe un phénomène de mode
actuellement, c’est le développement du
Lean Manufacturing ou « gestion sans gaspillage ».
Voilà la définition que l’on trouve sur le site «leleanmanufacturing.com »:
« Le Lean Manufacturing est basé
sur l’élimination des Gaspillages ou Muda au sein des processus de production.
Les apports du Lean sont une
réduction des stocks et des temps de production ainsi qu’une meilleure qualité,
moins de dommages et d’obsolescences, et une plus grande flexibilité grâce à une
organisation autour des processus.
Les Principes du Lean manufacturing
- Quantifier la Valeur : La valeur est définie en relation
avec le client.
- Identifier la Chaîne de Valeurs : Mettre en évidence
l’énorme quantité de gaspillages.
- Créer un nouveau Flux : Réduire les Gaspillages et
réduire la taille de lots et les encours.
- Laisser le client tirer le produit à travers la chaîne de valeur : Produire seulement ce que le client a commandé.
- Rechercher la Perfection : Améliorer continuellement la
qualité et éliminer les gaspillages. »
On comprend à la lecture de cette définition que les
entreprises qui choisissent la mise en place d’une organisation « lean »
risquent fort de focaliser les énergies non pas vers le souci permanent d’œuvrer
à la finalité réelle de l’entreprise en tant que productrice d’un bien ou d’un
service mais d’élever la dimension économique au rang de finalité. La
conséquence de cet état de fait, c’est la perte d’identité de l’entreprise ce
qui entraîne la perte de cohérence et une confusion dans la compréhension de son
positionnement sur son marché. Le message de préoccupation économique envoyé
aux partenaires et clients créé une dynamique de discussion sur les prix et les
économies au dépend de l’innovation et bien souvent de la qualité des produits
et des services.
Quand les Dirigeants expriment explicitement que la finalité
de leur entreprise c’est le profit, ils induisent dans leur écosystème un mode
de réflexion, de communication, de pensée, d’idéologie même…reposant sur le
tout économique. Les conséquences sont immanquablement une perte du sens de
la raison d’existence même de celle-ci, un mal être au travail des
collaborateurs qui n’ont plus la compréhension intelligible du sens de leur
engagement dans l’entreprise, le désengagement des forces vivent, des
revendications salariales fortes (valeur de l’entreprise), des discussions avec
les clients et partenaires qui reposent principalement sur les prix, la mise en
place de communication artificielle pour donner l’illusion d’une utilité…
L’outil de rationalisation par excellence c’est la norme.
Dans son article « La normalisation de la qualité et
l'évolution de la relation de production. In: Revue d'économie industrielle.
Vol.75. 1er trimestre 1996. pp. 291-307. » Denis Segrestin écrivait
« La mise en œuvre du partenariat
implique que les opérateurs qui se retournent vers le marché puissent y déceler
des «signaux visibles» (confiance institutionnelle NDR) de nature à compenser
les asymétries d'information, puis à susciter la confiance, pour parvenir
finalement à la constitution de véritables dispositifs de coopération. Encore
les « signaux» en question (tels que l'exhibition de labels ou de certificats)
ne sont-ils pas suffisants à cet effet : pour traiter au quotidien avec ses
sous-traitants devenus partenaires, l'entrepreneur a besoin d'instruments de
transaction robustes et économes... Pour nous arrêter sur ces données
élémentaires, les normes de type ISO 9000 seraient aujourd'hui l'une des
technologies adéquates à la mise en œuvre d'une telle stratégie: elles jouent
le rôle de signal sur le marché ; elles prescrivent une méthodologie rigoureuse
de gestion de la coordination interfirmes ; elles constituent un outil de
coordination standardisé, adéquat au souci des économies de transaction. »
La capacité d’une entreprise fournisseur potentiel à répondre
aux exigences des normes ISO 9000 est considérée comme un signal fort de
confiance institutionnelle susceptible de favoriser la relation commerciale.
Mais l’auteur poursuit quelques lignes plus loin :
« La lecture la plus
accommodante du texte des normes 9001 et 9002 ne manque pas de relever que tous
les devoirs y sont imputés au fournisseur -comme si le système avait pour
finalité véritable le traitement du contentieux et l'attribution préalable des
responsabilités au vendeur »
En d’autres termes, souhaitant parvenir à un niveau de
qualité total, l’industriel rompt le lien de confiance traditionnel qu’il
entretien avec ses fournisseurs pour le mettre en demeure de lui fournir des
produits « zéro défaut ». Pire, il prévoit dès le début de la
relation commerciale que le fournisseur sera tenu pour responsable de tous les
aléas de fabrication à venir.
Dans les faits en réalité, une telle relation n’est pas
tenable dans la durée et la négociation en cas de difficultés l’emporte
généralement. Mais dans les faits également, un tel niveau de pression exercé
sur un fournisseur le pousse au mensonge par omission. Comment reconnaître ma
responsabilité quand les conséquences pour mon entreprise sont… incalculables.
Et le mensonge est le poison de la confiance !
Analysons maintenant les arguments mis en avant par les
organismes de certification dans leur communication.
Si on se connecte au site internet www.iso.org,( la normalisation des entreprises
selon le référentiel iso étant certainement le plus répandu dans le monde),
voici ce que l’on peut lire:
« Les
Normes internationales garantissent des produits et services sûrs,
fiables et de bonne qualité. Pour les entreprises, elles sont des outils
stratégiques permettant d'abaisser les coûts, en augmentant la productivité
et en réduisant les déchets et les erreurs… »
Dans cette seule phrase d’introduction à la norme, on note
tout le paradoxe et l’illusion de la démarche. L’organisme de certification
vous promet l’impossible : la garantie de produits et services sûrs,
fiables et de bonne qualité. Puis, vient ensuite le réel bénéfice de la
normalisation en lien avec l’approche purement gestionnaire des
entreprises : abaisser les coûts, augmenter la productivité et réduire les
déchets et les erreurs.
Vouloir réduire les coûts et gagner en productivité sont des
objectifs logiques et de saine gestion, mais attention aux « contres
coûts » que peuvent entraîner une démarche mal digérée.
La mise en place de normes permettant d’apporter les
garanties nécessaires aux consommateurs quant aux possibilités de
« jouir » de leur bien de façon satisfaisante est un progrès
nécessaire. Mais restons-en là. Quand elles prétendent devenir des outils de
performance économiques, elles se détournent de leurs finalités. Il ne s’agit
pas en effet de remettre en cause les bienfaits de l’organisation et d’une
certaine rationalisation dans les processus industriel, mais il s’agit de
quitter le monde de l’illusion pour revenir au réel et accepter une vérité
fondamentale : il y a toujours une part d’aléas dans tout process
industriel.
La normalisation à outrance a eu et continu à avoir des
conséquences dramatiques sur les entreprises Françaises.
En succombant à l’illusion du zéro défaut, les théoriciens de
l’industrie ont mis à mal l’esprit d’entreprendre et les capacités créatives
des entreprises. Il en découle une approche commerciale catastrophique avec
comme seul identité résiduelle et comme seul argument commercial pour nos
entreprises : l’argument du prix.
vendredi 20 mars 2015
L’hyper normalisation et la perte d’identité des entreprises
La normalisation c’est une opération de lissage des
différences. Normalisation et standardisation sont deux réalités qui vont de
pairs. Le mille-feuille normatif
(accumulation des normes NDR) a pour conséquence la perte de l’identité des entreprises.
La perte de l’identité d’une entreprise, c’est la perte de sa visibilité
commerciale sur le marché. Le seul argument valable quand on a perdu son
identité spécifique, c’est le prix. Or chacun sait que si l’argument du prix
est le seul argument, les jours des entreprises Françaises sont comptés. Il y aura encore longtemps dans
le monde des pays qui produiront pour moins cher que nous.
Ce qui est constitutif de l’identité d’une entreprise ne se
limite pas à son image. L’identité est une réalité plus profonde, un mixe de
l’historique, des relations sociales, des valeurs, du secteur d’activité, de la
personnalité du ou des dirigeants, de la nature des produits, du niveau de
service, des capacités d’adaptations, des capacités créatives et d’innovations…
Toutes ces réalités seront ressenties intuitivement par les acheteurs
potentiels lors de leurs recherches de fournisseurs. Nous sommes en grande
partie dans la dimension irrationnelle de la relation. Cela se manifeste
lorsque l’on dit d’une entreprise ou surtout d’une personne et en l’occurrence,
du représentant de l’entreprise : « je ne le sent pas ».
Voici ce que pourrait être une relation client fournisseur reposant
sur la confiance :
Maintenant voici la même relation mais sous un régime de
l'hyper-normalisation
Pour répondre aux « exigences du client », les
fournisseurs acceptent une certaine forme d’ingérence dans leur propres entreprises. Les clients prennent en main
l’organisation. Or, les modèles d’AQF (assurances qualité fournisseurs)
ne sont pas poly-compatibles. Le résultat c’est que les entreprises qui
fournissent les grands donneurs d’ordres sont priées d’adopter les valeurs
culturelles de leurs clients. Quand il y a plusieurs clients ayant plusieurs
systèmes de valeurs, l’opération devient délicate et se résume par la mise en
place d’un système basé sur le plus petit dénominateur commun. En clair, la
perte d’un système de valeurs fédératrices pour l’ensemble des collaborateurs.
On assiste à la mise en place d’un système a minima qui consiste
surtout à énoncer des principes généreux que l’on placarde partout dans
l’entreprise et surtout dans le hall d’accueil
comme pour conditionner le visiteur et éviter qu’il ne découvre la
triste réalité.
Revenons un instant sur cette formule des « exigences du
client ». Elle indique à quel point nous sommes passés sous le régime du
rapport de force. Les clients, les donneurs d’ordres exigent de leurs
fournisseurs des garanties, des engagements, des assurances… qui très souvent
dépassent largement ce qui semble raisonnable (prenons pour exemple les
exorbitantes pénalités de retard prévues dans certains contrats). En
abusant de leur position dominante, ils poussent certains à prendre des
positions déraisonnables et mortifères.
Perte des valeurs, perte d’identité, produits banalisés… perte
de confiance…reste le prix. Pour éliminer toute velléité de négociation de la
part des fournisseurs, reste la mise en place des enchères dégressives… quelles
marges de manœuvre reste-t-il alors pour garder la maîtrise de son développement ?
Je discutais la semaine dernière avec un fournisseur de
pièces pour l’automobile. Il fournit aujourd’hui son client avec un grade qualitatif de 30
ppm (parties pour million) soit : 30 pièces hors « normes » sur
1 million ! Il vient d’avoir une discussion avec son client qui lui
réclame maintenant un grade qualitatif de 5 ppm ? Son inquiétude est
grande face aux actions à mettre en œuvre pour atteindre cet objectif. Il se trouve devants deux risques : un
coût financier qui le mettra hors de prix; et un coût social qui le mettra hors
d’usage !
Sous la pression normative et la nécessité de répondre aux « exigences »
des clients dans l’illusion du « zéro défaut », la mise en place
de solutions pour améliorer la qualité va prendre, dans le temps, la forme
suivante.
Période 1, toutes les actions mises en œuvre vont porter leurs
fruits et les progrès vont être efficaces et motivants.
Période 2, on observe un ralentissement du processus. Les
actions entreprises sont moins efficaces et on constate un essoufflement chez
les collaborateurs. Les contraintes prennent le dessus et il devient difficile
de garder un esprit de créativité qui donne du sens à l’engagement dans l’entreprise.
Période 3, les coûts engendrés par la mise en place de
nouvelles mesures et des contrôles qui vont avec deviennent exorbitants, les
gains en qualité obtenus pour chaque action entreprise sont minimes, les
collaborateurs sont démotivés par manque d’efficacité et de reconnaissance et l’entreprise
a perdu son identité.
Finalement, les coûts financiers, sociaux et d’images auront
raison de la politique qualité de l’entreprise qui va immanquablement se
dégrader à nouveau.
Nous sommes dans beaucoup d’entreprise en période 3.
Il y a donc une nécessité à redécouvrir le sens d’un
engagement partenaire reposant sur la confiance avec ses clients et partenaires
Cette démarche est difficile et nécessite des trésors d’astuces relationnelles.
Mais cette démarche n’est pas impossible. Elle repose, entre autre, sur la
réappropriation et la mise en lumière de la véritable identité de l’entreprise.
vendredi 13 mars 2015
A propos de la relation de confiance
La confiance repose sur 3 notions de bases qui sont :
- l’intégrité
- La
bienveillance
- Et
la crédibilité
L’intégrité dans une relation, c’est de promettre et de faire
ce dont je suis capable. Si je dois mettre en œuvre des processus
inexpérimentés, l’intégrité veut que j’informe mon interlocuteur. Dans une
économie dominée par la volonté de maîtrise des aléas, c’est un réel risque à
prendre.
La bienveillance, c’est vouloir du bien pour l’autre. Veiller
à son bien ! Il s’agit dans une relation de se préoccuper de ce qui est
bon pour l’autre et non plus de se préoccuper de ce que j’attends de l’autre.
Dans l’organisation d’un atelier industriel par exemple, je ne me focalise plus
sur les objectifs de production, mais je me préoccupe des conditions à mettre
en place pour créer une environnement favorable au désir de bien produire.
La crédibilité, c’est un langage de vérité qui évite comme un
poison l’utilisation du mensonge sous toutes ses formes : en parole, en
action et par omission.
Lawrence Zucker, sociologue américain qui s’intéresse aux
modes de production de la confiance a identifié dans ses travaux 3 niveaux de
production de confiance dans l’entreprise qui sont :
1. La confiance institutionnelle
Basée sur les structures de Confiance
2. La confiance relationnelle
Basée sur l’expérience historique;
principalement inter- personnelle, mais pouvant être étendue à un groupe; c’est
la base de la coopération
3. La confiance « Intuitu Personae »
Attachée à une personne mais exogène
à la relation (reconnaissance d’un diplôme par exemple)
La confiance institutionnelle pour une entreprise, ce sont tous
les investissements en Marketing et Communication, tous les gages de sérieux et
de compétence que l’organisation génère pour rassurer son environnement. En se
construisant une image, en investissant dans des évènements, en développant des
argumentaires, en réalisant des films publicitaires, des plaquettes
commerciales, en choisissant une structure juridique plutôt qu’une autre, en
normalisant son organisation, en cherchant des recommandations…elle a un
objectif c’est de nous convaincre qu’elle est digne de nous avoir comme client.
La confiance relationnelle est liée à l’expérience historique développée avec
les collaborateurs de cette entreprise. Elle se construit sur une expérience
personnelle et individuelle. Elle se construit également sur la rumeur (ce
qu’en disent les autres).
La confiance Intuitu Personae est la confiance que j’accorde
individuellement aux personnes de l’entreprise que je suis amené à côtoyer et
plus particulièrement dans le cadre d’une relation commerciale, avec le
« représentant » de l’entreprise. Ce niveau de confiance se construit
sur des facteurs objectifs ou considérés comme tels : appartenance
ethnique, diplôme… mais se construit également dans le temps et par
l’expérience : Je le connais, il me connait, il répond généralement
efficacement à mes demandes…
Voici schématiquement comment se construit ou se détruit une
relation de confiance.
La confiance se construit dans le temps et d’une manière
générale, notre première attitude dans une relation est une attitude de
méfiance. Ce qui va permettre à cette relation de confiance de se construire,
c’est la façon dont nous allons nous sentir entendu et compris par notre
interlocuteur, le respect avec lequel il va traiter nos demandes et la qualité
des réponses qu’il va nous apporter. Si notre ou nos interlocuteurs se montrent
inattentifs à la progression de l’installation d’un climat de confiance, s’ils
se montrent dans l’incapacité à répondre à nos questions, s’ils ne tiennent pas
leurs engagements, alors nous ne franchirons pas la barre de la confiance, nous
resterons méfiant voir nous tomberons dans la défiance.
Dans une relation managériale, la posture d’autorité
qu’incarne le manager lui donne un rôle déterminant sur la mise en place d’une
relation de confiance. C’est à lui de faire le premier pas. Pour permettre à
son ou ses subordonnés d’engager la démarche, il faut un signal fort. Il doit
donc décider de faire confiance et poser des actes qui prouvent son engagement.
Il doit prendre le risque de faire confiance. Quand la culture de la confiance
n’est pas la culture dominante dans son entreprise, il doit persévérer.
On observe que certains managers souhaitent sincèrement
établir la confiance dans leurs équipes. Mais ils doivent faire face à des
habitudes de méfiances ou de défiances. Au premier échec, à la première
« trahison », la tentation est forte d’un retour en arrière brutal
qui trouve dans cet échec une nouvelle légitimité. Pour les collaborateurs chez
qui le changement de paradigme relationnel avait créé un espoir de jours
meilleurs, un retour en arrière est la garantie d’une réelle démotivation.
Le pire des poisons de la confiance, c’est le mensonge.
Lorsque mon interlocuteur s’est engagé, qu’il a fait des promesses mais qu’il
ne les tient pas, je lui retire ma confiance.
La succession d'événements positifs met en place la confiance en faisant tomber l’une après l’autre
les barrières de la méfiance. Ces barrières sont autant de craintes, de peurs
qu’il faut apprivoiser ou combattre pour finalement s’ouvrir en vérité à son
interlocuteur.
mercredi 4 mars 2015
Retrouver l’esprit de Coopération
La récente émission sur le Bonheur au travail proposée par
Arte nous apprend que 61% des salariés sont « désengagés » dans les
entreprises Françaises. Ils viennent chercher un salaire, 28% sont « activement
désengagés ». Ils sont en état de souffrance et agissent pour détruire l’objet
de leurs souffrances et seulement 11% sont engagés dans leur travail !
La gestion des ressources humaines est une préoccupation
constante des entrepreneurs depuis le début de la révolution industrielle. Elle
a fait preuve de nombreux tâtonnements. Après deux siècles d’expérimentations,
force est de constater que l’Homme reste un mystère pour l’entreprise.
Avec l’apparition des moyens de propulsion mécaniques à la
fin du 18ème siècle puis des moyens de communication électroniques
(téléphone au 19ème siècle), l’humanité est entrée dans un processus
exponentiel d’accélération du temps et d’abolition des distances géographiques.
Cette réalité technique a permis une accélération incroyable
du développement surtout dans les pays dit industrialisés puis l’avènement de
la mondialisation et l’apparition du principe de « village mondial »
qui laisse à penser que les Chinois sont nos voisins les plus immédiats. Chaque
jour nous pouvons être en contact en direct avec des collaborateurs, des
clients des partenaires où qu’ils se trouvent dans le monde.
La dimension humaine est à la fois pilote, bénéficiaire et
victime de ce phénomène. Elle se trouve ballotée dans les remous successifs et
rapprochés des vagues de changements auxquels il faut sans cesse faire
face.
La part humaine dans l’entreprise a connu au début de l’air
industriel une période avilissante avec l’école classique en 1910 ou l’homme
est reconnu comme une simple ressource subordonnée aux contraintes de
production. C’est le principe de rationalisation avec les travaux de Ford,
Fayol et Taylor ; En 1930 avec l’avènement de la première grande crise
économique mondiale s’ouvre une période
humaniste. C’est l’école des relations humaines et les travaux de Mayo,
Maslow, Lewin, Mac Gregor… La productivité est liée, pour les tenants de cette
approche, aux facteurs humains et repose sur l’importance de rendre
intelligible aux travailleurs la tâche qu’ils ont à accomplir. Le clivage
décisionnel entre la direction et les ouvriers subsiste; En 1960 apparait
l’approche systémique et stratégique des organisations. Les travaux de Crozier
et Friedberg permettent de mettre en évidence l’influence de l’environnement et
les limites des règles sur le degré de motivation des salariés et leur
productivité ; en 1970, face à la monté des revendications sociales on
observe la mise en place des approches contractuelles avec une judiciarisation
des relations dans le travail qui continue à s’accentuer aujourd’hui encore;
enfin les années 90 connaissent l’avènement de l’approche gestionnaire avec la
financiarisation des entreprises, approche qui a toujours cours aujourd’hui et
dont la conséquence principale est un brutal retour à la case départ et une
gestion avilissantes de « ressources humaines ». En 2008, la deuxième
grande crise mondiale créé une dynamique de replis sur soi et on observe la
mise en place d’un courant de gestion individuelle de l’homme au travail. C’est
l’hyper psychologisation avec, entre autre, le développement de
l’accompagnement individuel (Coachs de la performance). Le risque majeur de
cette approche, c’est l’individualisation excessive et la perte de l’esprit de
coopération.
L’homo Economicus qui est la clé de tout développement
économique se trouve donc depuis la fin du 19ème siècle balloté dans
la spirale de l’accélération du temps et du développement des moyens de
communication. Sa capacité à l’autodétermination pose un problème dans la
vision gestionnaire de la gouvernance des entreprises. Nul n’est certain en
effet, contrairement à la mise en œuvre d’une machine, que le résultat du travail réalisé par un
collaborateur sera le résultat attendu. Comment espérer alors atteindre ses objectifs
et planifier un développement? La tentation est forte de le remplacer par une
machine.
Les scientifiques se sont penchés sur le mode de
fonctionnement de l’homme pour tenter de prévoir ses réactions et d’organiser
les conditions environnementales favorables à la productivité attendue. Mais
après 1 siècle de recherches et de mise en application, les résultats sont pour
le moins décevants. Aucune Ecole, aucun courant de pensée aucune technique n’a
pu venir à bout de l’imprévisibilité
des réactions humaines. Et c’est tant mieux !
La conséquence de l’approche mécaniste de l’organisation des
entreprises, c’est une perte de repères et une
déstructuration des personnes avec une tendance à fragmenter l’homme en
morceaux utiles (cerveau ; bras)
pour le contrat passé avec l’entreprise et en morceaux inutiles voir considérés
comme néfaste (cœur avec sa dimension affective, cerveau pour les exécutants,
dimension spirituelle…) et donc au mieux
ignorés, au pire, combattus. Mais la nature humaine se révolte et tend à
retrouver son intégrité son équilibre sa dignité. C’est l’avènement du
développement individuel. La vie au travail créant un déséquilibre dangereux,
l’Homme cherche un rééquilibrage ailleurs. Il consulte, se fait accompagner,
fait du sport, il développe des conduites à risque, il est tenté par
l’expérience sectaire, il développe des
maladies… la génération Y qui ne croit plus à un possible épanouissement
au travail et peine à se mobiliser est sans doute l’aboutissement de ce
processus.
La ressource humaine a cette extraordinaire qualité c’est
qu’elle est « intelligente » ce qui lui donne la capacité à
l’autodétermination soit la capacité de choisir librement si oui ou non elle va
coopérer à la finalité de son entreprise. L’observation du schéma précédent nous
amène à constater qu’il a fallu sans cesse développer de nouveaux courants de
pensées pour essayer d’améliorer la disponibilité et l’efficacité de la
ressource humaine au travail. La perte de vue de vue cette nécessité de la
coopération intelligente créé des conditions de crises.
Depuis les années 90, c’est la gestion qui prédomine dans le
mode de management des entreprises avec une finalité : faire du profit.
Quand on parle dans les séminaires de management de la
nécessité de donner une vision d’entreprise on mesure la limite qu’il y a de faire
du profit la réelle vision des dirigeants ou des propriétaires. Bien
évidemment, cette finalité sous-jacente n’est jamais exprimée de manière
brutale. Mais quand elle est ancrée dans les gènes de l’entreprise, elle transparaît et tous les discours qui tentent de la faire disparaître, tous les
chiffons rouges agités pour détourner l’attention sont autant d’éléments de
fragilisation de la confiance potentielle.
Dans une vision gestionnaire du management la rationalisation
prend des allures de philosophie d’organisation. L’homme est alors considéré
comme une ressource au même titre que les autres ressources nécessaires
à la production. Mais l’homme n’étant ni un objet, ni une machine mais un corps
organique capable d’autodétermination, il
est souvent perçu comme une limite. Ses aléas biologiques, psychologiques,
sa nature même, font de lui une ressource peu fiable. Dès que cela est rendu
possible, il est remplacé par une machine.
L’homo économicus est donc désunifié chosifié puis
désemployé.
Face à certaines dérives constatées par l’augmentation des
plans sociaux, le développement des maladies professionnelles, le développement
des suicides sur les lieux de travail, le développement de la violence au
travail… les pouvoirs publics tentent d’allumer des parts feux législatifs.
C’est le cas, par exemple, des récentes lois sur les Risques Psycho Sociaux. Ce
faisant, ils augmentent les contraintes de gestions et la judiciarisation des
relations. La conséquence c’est la perte du lien directe et du lien de
confiance entre les personnes. Chacun se réfugie derrière les textes de loi et
l’homme de loi a fait une entrée remarquée dans la gestion des relations et des
conflits dans les entreprises.
En parallèle de ce phénomène de judiciarisation de la
relation s’est développé un sentiment de victimisation. Chacun d’entre nous
peut aujourd’hui au regard de la loi se considérer comme la victime d’un système ou d’un autre, d’une personne ou d’une autre. La conséquence de cette
attitude c’est la passivité et l’agressivité. Quand je suis la victime d’une
injustice, j’attends de plein droit que cette injustice soit réparée. Je
deviens donc passif dans l’attente que le coupable répare l’injustice.
Redonner du sens à l’engagement de tous dans l’entreprise n’est
plus une option.
Pour y parvenir avec succès, un travail en profondeur sur la
Vision, la Finalité, les Valeurs, le Projet... de l’entreprise est une
nécessité. Leurs mises en lumières seront autant d’occasions de permettre à chacun
de retrouver des raisons à s’engager à nouveau dans une démarche de
coopération. Elles redonneront à la dimension Humaine de l'entreprise la capacité de compréhension intelligible de la "raison d'être" de leur entreprise et ils pourront alors décider en conscience d'adhérer au projet.
Et pour le respect des salariés, cessons définitivement de gérer les Hommes et les Femmes dans l’entreprise comme une vulgaire ressource!
Inscription à :
Articles (Atom)