« Connaitre, ce n’est point démontrer, ni expliquer, c’est accéder à la vision »

Antoine de Saint-Exupéry

samedi 9 décembre 2017

LA PLACE DU TRAVAIL DANS LA QUETE DU BONHEUR

« L’homme le plus heureux est celui qui sait mettre en rapport la fin de sa vie avec le commencement » Goethe

« Le Bonheur c’est l’accomplissement de soi à travers l’accomplissement d’une œuvre exigeante, collective, utile et sans cesse perfectible »

Voici donc la définition du bonheur sur laquelle je vous propose de reposer notre réflexion.

Au regard de cette définition, quoi de plus légitime que la réalisation d’un travail comme voie de bonheur ? Si être heureux c’est s’accomplir, à travers l’accomplissement d’une œuvre, le travail humain est de toute évidence une voie royale pour être heureux. C’est d’ailleurs de qui donne un sens merveilleux au mot « ouvrier ». Celui qui accompli l’œuvre.

Etre heureux c’est exprimer à travers l’œuvre de sa vie sa singularité d’Homme ou de Femme. Etant des êtres imparfaits, vivant dans un univers infini, notre bonheur repose sur notre capacité à travailler la matière et à œuvrer ensemble à l’amélioration de notre condition humaine. Et cette œuvre ne trouve son sens que dans le fait qu’elle soit collective : avec les autres et pour les autres. C’est à la fois une nécessité, une contrainte et une finalité. Et le paradoxe c’est que, nous sachant mortel, c’est finalement plus dans ce que nous laissons aux autres, ce que nous faisons pour les autres que dans ce que nous faisons pour nous même que nous développons un sentiment de bonheur « accompli ».

Il n’y a pas de légitimité économique pour une entreprise si ses clients n’acceptent pas de donner de la valeur au service ou au produit proposé. La « relation heureuse » de toute entreprise humaine avec son environnement c’est de coopérer au développement d’un sentiment de « bonheur » chez ses clients. Il suffit de regarder, pour s’en convaincre, la teneur des messages publicitaires. Pour vendre un produit quel qu’il soit, le publiciste s’évertue à créer un environnement censé représenter une image du bonheur : un pavillon, deux enfants (un garçon, une fille) un chien, une très belle femme qui mange… un yaourt… Sans ce yaourt, le bonheur sera, évidemment, moins intense !

Si les clients ne sont pas « satisfaits » du service ou du produit proposé par l’entreprise, ils ne renouvellent pas leur acte d’achat. Il n’y a pas d’entreprise qui ne soit au service d’un besoin ou du désir d’au moins une personne. Chaque action dans chaque entreprise de ce monde trouve son sens parce que « in fine » une personne trouvera de l’utilité, une satisfaction à l’usage du bien ou du service produit.

Fabriquer des voitures, c’est se mettre au service du besoin de mobilité des personnes. Tel est la finalité des constructeurs automobiles. Mais également de l’industrie aéronautique et de l’industrie ferroviaire… Ils répondent tous à la même finalité, la mobilité, mais ne le font pas avec la même vision. Si dans un avenir prochain nous n’avons plus besoin de nous déplacer, alors l’industrie automobile disparaitra ou sera contrainte d’évoluer vers une autre finalité. Et chacun peut comprendre combien le fait de se déplacer confortablement et rapidement est aujourd’hui une facilité pour « s’accomplir » à travers un travail, des voyages, diverses œuvres qui donnent un sens à notre vie.

Il nous faut ici distinguer le besoin du désir. Le besoin peut être considéré comme une nécessité, la consommation d’un « bien » indispensable pour pouvoir œuvrer dans ce monde.
Le désir c’est ce superflu qui répond plutôt à une volonté de maitrise du sentiment de bonheur. La satisfaction d’un désir est ce qui provoque le plaisir. La satisfaction d’un besoin est ce qui provoque la joie, un sentiment d’apaisement.

Le plaisir peu participer au bonheur. Ce n’est pas le bonheur. Il n’est pas nécessaire d’avoir du plaisir pour être heureux. Lorsque que je gravis le Mont Blanc, la souffrance de l’ascension n’est pas un moment de plaisir. Mais la valeur subjective que je donne et que les autres donnent à cette ascension provoque la joie. J’accompli un « exploit » !

Si je désir « boire un coup » lorsque je sors avec des amis, ce n’est pas tant que je doive étancher ma soif, mais bien parce que l’état d’ébriété que me procure l’effet de l’alcool agit comme une « joie » artificielle. C’est la même chose pour toutes les drogues. Le danger de la quête des plaisirs artificiels c’est le risque de l’addiction. En recherchant le paradis, on risque de trouver l’enfer. Il ne s’agit évidemment pas ici de poser une valeur morale sur ce phénomène. Ce n’est pas le lieu. Il s’agit d’observer une réalité qui peut détourner certains de l’accession à un sentiment de bonheur profond.

Certaines activités économiques sont plus orientées vers la satisfaction de désirs que de besoins. Ces activités, souvent, jouent sur le ressort efficace économiquement de fidélisation par l’addiction.
Certains désirs deviennent des besoins. Avoir un ordinateur portable dans les années 80-90 relevait plus du désir que du besoin. Aujourd’hui, pour beaucoup de personnes, c’est un besoin, une nécessité pour pouvoir travailler.
Dans les années 80-90, le désir lié à la possession de ce portable était la volonté de paraitre comme quelqu’un de moderne, en avance sur son temps. Un désir d’image.
L’évolution des produits et de l’identité de la marque Apple est tout à fait symptomatique.
La vente des produits Apple répond toujours initialement à un désir et non à un besoin. Ces produits finissent par devenir un besoin lorsque toute le monde en possède. Il y a un phénomène d’addiction à la consommation des produits de cette marque. Le fait que certaines personnes dorment plusieurs jours devant les magasins au moment de la sortie de nouveaux produits en est la preuve.


A la semaine prochaine !!!

samedi 2 décembre 2017

BONHEUR ET HUMILITE

Le bonheur, c’est aussi savoir faire preuve d’humilité et accueillir la différence.

«" Soyez vous même, les autres sont déjà pris" Oscar Wilde

A force de chercher à toujours prouver au monde notre valeur, nous prenons le risque de nous perdre nous-même et de ne plus savoir qui nous sommes.
Pourquoi s’enorgueillir de nos capacités spécifiques ?
Pourquoi s’enorgueillir de ce qui repose sur des dons naturels ?
Pourquoi désespérer dans l’espérance de dons et talents qui ne sont pas les nôtres ?

Quelques soient nos croyances, force est de constater que nous sommes pour bien peu de chose dans ce que nous sommes. Notre vie, notre être, nous l’avons reçu. Nous n’avons pas été consulté pour ce « projet ». Et tous nous avons des dons.
L’expression « réussir sa vie » est incorrecte par le fait que ne pas réussir sa vie est impossible. Nous ne sommes pas les maitres de cette vie. Par contre « réussir son projet de vie » est une belle ambition. Puisque que j’ai reçu cette vie comme un don, puisque je suis équipé d’un être imparfait mais doué, que vais-je bien pouvoir en faire pour moi et pour les autres ?

« Ce que tu n’apporteras pas à ce monde, ce monde ne l’aura jamais »

Nous pouvons légitimement être fier de ce que nous accomplissons. Cette fierté est liée à la reconnaissance des efforts qui permettent ces accomplissements. Mais nous n’avons pas à nous enorgueillir de ce que nous avons reçu comme dons. Au contraire, nous devons recevoir cet héritage avec humilité pour en prendre soin et accomplir des œuvres à la hauteur de nos capacités.
Puisque le bonheur repose sur l’effort qui a été nécessaire pour accomplir l’œuvre et en donne une valeur subjective spécifique, s’enorgueillir d’une œuvre que nous avons réalisé avec facilité atténue le sentiment de bonheur

Finalement, ce n’est pas parce que notre environnement méprise nos dons et nos talents qu’ils n’ont pas de valeurs. Ce n’est pas parce que ce monde Post Moderne ne valorise que ce qui est monétisable que le reste n’a pas de valeur.
Une vision consumériste qui donne à croire que le bonheur est le résultat d’une réussite se mesurant à l’aune de son pouvoir d’achat amène des dérives dangereuses pour l’humanité. Aussi dangereuse que toute les idéologies raciales. En effet, les personnes qui se trouvent dans l’incapacité de jouir de biens de consommation sont supposées ne pas pouvoir être heureuses voir d’empêcher les autres de l’être. Les personnes qui sont dans l’incapacité de produire des œuvres de consommation sont supposées inutiles donc sans valeurs. Le mieux n'est il pas alors de les aider à constater leur malheur, puis de les supprimer?? 

Le simple fait de de permettre aux autres de faire quelque chose de valeureux est déjà une valeur en soi.


A la semaine prochaine…

mercredi 29 novembre 2017

LE BESOIN DE RECONNAISSANCE

Le sentiment de bonheur repose sur une double 
satisfaction : La satisfaction liée à la fierté de l’œuvre 
accomplie et la satisfaction de la reconnaissance de l’œuvre accomplie par les autres. Une « identification » intrinsèque, qui vient de mes aspirations profondes, et une reconnaissance extrinsèque qui manifeste la valeur de l’œuvre.  

C’est ce qui est à l’origine de notre besoin fondamental de reconnaissance. Nous avons tous besoin de reconnaissance comme d’un carburant indispensable pour franchir une étape supplémentaire.

Le sentiment de bonheur peut cependant reposer simplement sur la reconnaissance de notre spécificité, de notre unicité, de notre dignité. C’est ce qui arrive au nourrisson lorsque sa mère lui sourit et lui témoigne de son amour. Le Bébé n’a comme seul moyen de s’accomplir comme être humain, que ce que sa nature propre de Bébé lui permet. Etre aimé pour ce qu’il est plus que pour ce qu’il fait. 
C’est sans doute ce qui fait d’ailleurs le fondement même de notre aspiration au bonheur. Aimer et être aimé pour ce que nous sommes vraiment. Toutes les œuvres que nous accomplissons n’ont pour simple finalité que de nous montrer au monde tel que nous sommes pour que le monde nous reconnaisse. Mais pour être vraiment heureux, il est nécessaire de s’accepter tel que nous sommes et non pas de chercher à nous sublimer, d’accepter l’inachèvement des œuvres que nous accomplissons et non pas de courir après la perfection, d’accepter que d’autres sont plus efficaces et reconnus et ne pas travestir notre réalité.


Le manager, la personne en position d’autorité a, dans cette réalité, un rôle particulièrement important à jouer qui tient d’une posture bienveillante. Ce rôle c’est de reconnaitre ce qui a été accompli avec justesse, en tenant compte de qui l’a réalisé. Accueillir le collaborateur dans sa réalité et juger le résultat en fonction de son potentiel. A force de ne tenir compte que de la qualité du résultat, nous observons dans nos entreprises le développement du mythe de la perfection qui n’a comme conséquence que de provoquer un désengagement profond des collaborateurs. Pourquoi faire des efforts, pourquoi se fatiguer au travail pour un résultat qui sera inévitablement jugé comme insuffisant ? 

La perfection n’existe pas et c’est tant mieux !

A la semaine prochaine !